Moyen Âge
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L’amour n’est pas seulement l’un des sujets privilégiés de la littérature médiévale, il est aussi l’objet d’une tradition discursive originale : un vaste ensemble de motifs narratifs et lyriques, de multiples possibilités expressives, ainsi que des contextes hétérogènes qui se manifestent autant dans la richesse des formes que dans la diversité des supports. Le tout est intimement lié à l’univers de la littérature courtoise, qui le façonne ou l’absorbe, selon les époques.
Loin de rechercher une définition univoque, cette archéologie entend identifier les composantes primaires de l’amour littéraire entre le xiie et le début du xive siècle dans la littérature galloromane. Car les dynamiques liées à la naissance, à la codification et à la transformation des discours érotiques changent à travers les textes, le temps et l’espace. Ce faisant, elles engendrent des couches sémantiques et produisent des superpositions interprétatives. Leur compréhension se place ainsi du point de vue des œuvres, de leur mouvance, des outils stylistiques et de la tradition manuscrite.
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SOMMAIRE DU PRÉSENT FASCICULE
Pierre-Yves Badel (1938-2023)
Claude Thiry (1943-2023)
Jean-Charles Herbin, La rédaction NT du début de Garin le Loherain : indices
de datation et de localisation
Florence Ninitte, La figure de Muḥammad dans le Ms. L II 14 de Turin, entre
prophète et hons faés
Michel Nassiet, Le roman Artus de Bretagne, mémoire et consolation
Andrea Maccio, Vere tu es Deus absconditus. Nouvelles considérations stemmatiques
sur la tradition textuelle de la Voie d’Enfer et de Paradis de Pierre
de l’Hôpital (1315-1336)
Elena Koroleva, Le Poème sur la Toison d’or de Philippe Bouton : une édition
critique. Présentation du manuscrit et du texte
MÉLANGES
Claude Roussel, Estenelle
Alain Corbellari, Olivier de Verdun ou d’Yverdon ?
DISCUSSIONS
Piero Andrea Martina, Saint Alexis et quelques-uns de ses lecteurs : notes
sur A
David Hult, À propos de La Mort le Roi Artu, Roman du XIIIe siècle
COMPTES RENDUS
SOMMAIRE DU PRÉSENT FASCICULE
Pierre-Yves Badel (1938-2023)
Claude Thiry (1943-2023)
Jean-Charles Herbin, La rédaction NT du début de Garin le Loherain : indices
de datation et de localisation
Florence Ninitte, La figure de Muḥammad dans le Ms. L II 14 de Turin, entre
prophète et hons faés
Michel Nassiet, Le roman Artus de Bretagne, mémoire et consolation
Andrea Maccio, Vere tu es Deus absconditus. Nouvelles considérations stemmatiques
sur la tradition textuelle de la Voie d’Enfer et de Paradis de Pierre
de l’Hôpital (1315-1336)
Elena Koroleva, Le Poème sur la Toison d’or de Philippe Bouton : une édition
critique. Présentation du manuscrit et du texte
MÉLANGES
Claude Roussel, Estenelle
Alain Corbellari, Olivier de Verdun ou d’Yverdon ?
DISCUSSIONS
Piero Andrea Martina, Saint Alexis et quelques-uns de ses lecteurs : notes
sur A
David Hult, À propos de La Mort le Roi Artu, Roman du XIIIe siècle
COMPTES RENDUS
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Chef-d’œuvre mutilé, auréolé de mystère, le Tristan et Yseut composé par Thomas vers 1170 se démarque des autres versions par sa fine analyse des sentiments amoureux, sa tonalité très sombre et son style virtuose qui joue volontiers sur les sons et les sens. Unis par l’amer pouvoir d’un philtre merveilleux, Tristan et Yseut la Blonde, l’épouse du roi Marc, vivent loin l’un de l’autre un amour impossible, jusqu’à ce que Tristan, malade et croyant avoir perdu Yseut à jamais (lors du célèbre épisode de la voile noire), ne meure de chagrin.
L’édition de Bartina H. Wind est ici revue et corrigée par Louis-Patrick Bergot. Complété par le fragment de Carlisle, le texte original est assorti d’une traduction qui allie les impératifs de fluidité et de fidélité, ainsi que d’une bibliographie actualisée et d’un riche glossaire. Une introduction inédite situe les fragments dans leur contexte et propose des clés d’interprétation de ce texte essentiel, qui eut une infence décisive dans l’évolution de l’imaginaire courtois.
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TABLE DES MATIÈRES:
INTRODUCTION
DU COLLOQUE AU LIVRE
PREMIÈRE PARTIE
ENJEUX POÉTIQUES ET STYLISTIQUES
Maureen Boulton, « Imagination et théologie mystique dans les sermons français de Jean Gerson »
Vivianne Griveau-Genest, « Une riche matière? Sur un statut littéraire de la théologie dans les sermons latins et français de Gerson »
Matthew Vanderpoel, « Scriptual Rhetoric, Exegesis, and (Un)certainty in Gerson »
Isabel Iribarren, « Pia credulitas : vers une ars poetica gersonienne »
Giovanni Matteo Roccati, « Gerson poète : le témoignage de la métrique »
DEUXIÈME PARTIE
LA DÉVOTION GERSONIENNE, PRATIQUES ET MODALITÉ D'EXPRESSION
Cédric Giraud, « Du formulaire liturgique à la création littéraire : Jean Gerson et la prière »
Earl Jeffrey Richards, « Piété populaire et féminine et dévotion érudite : l'interface dynamique entre le latin et le vernaculaire chez Jean Gerson et Marguerite Porete »
Carla Casagrande et Silvana Vecchio, « Affectivité et dévotion à la fin du Moyen Âge : Gerson et la compassion »
Gareme M. Boone, « Gerson musicus, Dufay et le cantus affectif »
TROISIÈME PARTIE
GERSON SUR LA SCÈNE POLITIQUE ET INTELLECTUELLE
Lucie Jollivet, « Non occides : juger et punir l'homicide volontaire, d'après l'oeuvre polémique et poétique de Jean Gerson, 1408-1423 »
Nancy McLoughlin, « Gerson and Crusade »
Lori J. Walters, « Jean Gerson and Christine de Pizan as Teachers and Publishers to the Queen's Court »
Rudolf Schuessler, « Gerson and Moral Benevolence »
Marc Vial, « La théorie de Jean Gerson dans l'histoire du discours sur la (théologie) mystique »
QUATRIÈME PARTIE
FORTUNES DE L'OEUVRE GERSONNIENNE
Virpi Mäkinen, « Gerson's Legacy on Late Medieval and Early Modern Rights Discourse »
Gilles Polizzi, « Le fantôme de Gerson chez Rabelais : une référence au coeur de l'oeuvre? »
Yelena Mazour-Matusevich, « Jean Gerson et les premiers jésuites : un aperçu de la recherche »
Bénédicte Sère, « Jean Gerson ecclésiologue. Les réinventions de la modernité (XVe-XXie siècle) »
CINQUIÈME PARTIE
MANUSCRITS ET PROBLÉMATIQUES ÉDITORIALES : VERS UNE NOUVELLE ÉDITION DU CORPUS GERSONIEN
Isabelle Fabre et Geneviève Hasenohr, « Un pseudo-Gerson : le Petit traité du manuscrit BnF, fr. 1843 »
Béatrice Beys. « L'image de Gerson dans les manuscrits de son oeuvre : de l'Icon peregrini à l'écrivain donateur »
Daniel Hobbins, « Three Versions of Jean the Celestine's List of Gerson's Works, the "Annotatio II" (1429-1434) »
BIBLIOGRAPHIE
INDEX NOMINUM ET OPERUM
INDEX MANUSCRIPTORUM
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Rédigé après 1457 et avant 1461, ce recueil de miracles en prose est une continuation anonyme des Miracles de Notre Dame de Jean Miélot. Il comporte soixante-quatorze récits qui s’appuient sur des versions antérieures en latin, puis en français. De longueur variée, ces miracles ont pour finalité d’édifier les chrétiens en montrant la bonté de la Vierge Marie, qui agit pour sauver les hommes quand ils lui font appel dans leurs prières, à une époque où le miracle fait partie intégrante de la vie quotidienne des hommes. Ces miracles concernent toutes les conditions sociales et témoignent d’une foi simple et entière dans les pouvoirs de la Vierge Marie, dont la bienveillante miséricorde est accessible à tous. Les hommes pensent ainsi pouvoir être guéris d’un mal physique ou encouragés à ne pas céder aux tentations du démon. Les récits sont bien conduits et rédigés avec soin. Leur mise en scène réserve souvent des rebondissements inattendus. Le texte en moyen français est assorti, en regard, de sa traduction en français moderne. Une table des noms propres, ainsi qu’un riche glossaire complètent l’édition.
Spécialiste de philologie française médiévale, Gilles Roussineau est professeur émérite à Sorbonne.
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Si la recherche sur Luther a consacré plusieurs études d’ampleur à la question des héritages médiévaux du Réformateur, il n’en va pas de même pour la recherche sur Philippe Melanchthon. Pourtant, les Loci communes fourmillent, dès la première édition publiée en 1521, de références variées aux « docteurs scolastiques », avec des focalisations parfois différentes de celles de Luther à la même date. L’idée que Melanchthon se fait de la théologie médiévale est-elle pour autant originale ? L’apparente radicalité de son rejet de la « scolastique », dans les écrits des années 1520, ne dissimule-t-elle pas, en réalité, d’importantes influences souterraines ? Et quelles sont les sources médiévales privilégiées de l’humaniste ? Cette étude tente de répondre à ces questions en interrogeant, en particulier à partir du concept d’imputation, les liens de Melanchthon avec la tradition scotiste et occamiste, autour des doctrines de la justification et du péché originel, de 1520 à 1535 environ.
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Nous n’avons plus aujourd’hui qu’un écho du travail de communication des prédicateurs d’antan que furent au Moyen Âge les premiers disciples de saint Dominique et de saint François, et quelques autres clercs formés dans les écoles, voire à la faculté de théologie. Le contexte du tournant pastoral du XIIIe siècle donna à leur prédication, fréquente en ville, une place de choix un peu partout en Europe. À leurs appels à se repentir et à changer de vie, inspirés par les Évangiles, s’ajoutait la promotion d’une discipline centrée sur la pratique régulière de la confession annuelle. Nous mesurons difficilement la réception de leurs propos, mais il est certain que tous ces orateurs partageaient l’intime conviction de « l’efficience des mots » : avec l’aide mystérieuse de la grâce de Dieu, ceux-ci étaient dotés d’une capacité d’agir en produisant un effet attendu.
L’historien peut au moins capter dans les sources dont il dispose la manière dont ces orateurs façonnaient leur parole d’exhortation. Le plus souvent préservée en ce temps de tout discrédit, elle était proférée publiquement, afin de susciter l’assentiment d’auditeurs à qui les prédicateurs parlaient en recourant au langage du quotidien, tout en chargeant celui-ci d’une grande richesse de sens.
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Focusing on a little studied miscellany by Claude Fauchet (1530-1602), this book reveals the role of the medieval in crafting an image of French modernity during the Renaissance. Designed to confront the Pléiade with the rich legacy of medieval French, the Veilles argued that an illustrious vernacular had to be rooted in native traditions, richer by far than generally credited. From meter in the twelfth-century Roman d’Alexandre to the emendation of Philippe de Commynes’s Mémoires, and from dueling etiquette to the tomb of Jean de Meun, Fauchet’s observations even reach into his present moment, with essays on Lemaire de Belges, Marot, and Ronsard. Here is an echo of a very different French Renaissance, in which the Burghers of Calais are more important than Francion, and a knowledge of Old French more desirable than classical erudition. Furthermore, as a response to rupture and loss, the Veilles are perhaps the earliest snapshot of a primary stage in the reception of medieval French literature.
Abordant un recueil peu étudié de Claude Fauchet (1530-1602), ce livre révèle le rôle du médiéval dans la construction d’une image de la modernité française à la Renaissance. Conçues pour confronter la Pléiade au riche héritage de la France médiévale, les Veilles soutenaient qu’une illustre langue vernaculaire devait être enracinée dans les traditions autochtones, bien plus riches qu’on ne le pense généralement. De la métrique du Roman d’Alexandre à l’émendation des Mémoires de Philippe de Commynes, et des règles du duel à la tombe de Jean de Meun, les observations de Fauchet portent aussi sur son époque, avec des essais sur Lemaire de Belges, Marot et Ronsard. Émerge alors l’écho d’une Renaissance française très différente, dans laquelle les bourgeois de Calais sont plus importants que Francion, et la connaissance de l’ancien français plus souhaitable que l’érudition classique. Comme une réponse à la rupture et à la perte, les Veilles sont peut-être le tout premier instantané d’une étape fondamentale dans la réception de la littérature française médiévale.